Espace partagé

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Le vieil homme, perché là-haut sur un nuage, observait le monde et la planète Terre. Il avait renoncé à s’inquiéter pour Elle. Les catastrophes climatiques annoncées se produisaient régulièrement et le réchauffement global ne devait pas  y être étranger.

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Quelques années auparavant,  il avait fait de son mieux pour alerter l’opinion :  sans grand succès. Il avait donc décider  de se concentrer sur sa tâche, sur l’œuvre de toute une vie : s’assurer que les  cadeaux demandés seraient bien livrés à la bonne adresse, dans la bonne cheminée, le bon chausson et à la bonne heure.

Après tout si l’Humanité refusait d’assurer la survie de sa  propre espèce, ce n’est pas lui qui pourrait le faire tout seul.

Chaque année, le Père Noël devait relever un défi : sur son traineau, se frayer un chemin dans l’espace toujours plus encombré de satellites, stations spatiales et autres débris divers qui gravitaient au-dessus de nos têtes.

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Ne nous  méprenons pas. Bien qu’adepte d’un moyen de transport très ancien et très rudimentaire, le Père Noël n’était pas hostile au progrès. Au contraire, les multiples inventions de l’Humanité lui donnaient d’infinies possibilités de cadeaux.

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Mais quand même.

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Autrefois, il lui suffisait d’indiquer une seule fois le chemin à ses rennes pour que la tournée s’organise.

Maintenant, il lui fallait bien étudier le parcours avant de s’élancer. Si un nouveau satellite avait été lancé dans l’année, c’était mieux d’être au courant pour éviter une collision fatale à la diffusion des programmes télés ou à l’envoi de SMS le 24 au soir.

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Le plus gros inconvénient n’était pas tant les nouveaux satellites que les anciens. Hors d’usage mais pas hors de l’Espace. Un paquet de vieux trucs trainaient autour de la Terre.

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Le Père Noël relu la liste des cadeaux qui lui avaient été demandés. En cette période de Fêtes il avait toujours un exemplaire sur lui.  Mais nulle part, il n’y avait une demande pour un “dépollueur de stratosphère”. Tant pis. Peut-être l’année prochaine.

“Il es temps de rentrer” lui dit la Mère Noël ….car comment imaginer que ce Grand Homme pouvait mener à bien sa Grande Œuvre sans qu’une épouse, forcément exceptionnelle, ne soit à ses côtés….

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Obsolescence déprogrammée

Le vieil artisan avait beaucoup hésité. Depuis le temps qu’il travaillait avec ses vieux outils, il se demandait s’il n’allait pas passer à quelque chose de plus moderne.

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Un GPS denier cri, voilà un truc qui servirait pour ses tournées. Même s’il connaissait son vaste territoire par cœur, parfois il avait un peu douté sur le chemin à emprunter pour livrer ses commandes.

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Un téléphone portable quadri, quintuple ou même octuple bande (il ne savait pas trop combien il y en avait), voilà voilà un truc qui servirait pour ses tournées.

Même si son sens de l’organisation lui avait évité bien souvent de rappeler le bureau pour se faire confirmer tel ou tel changement de dernière minute dans une commande.

Une tablette PC, voilà voilà un truc qui servirait pour ses tournées. Il aurait tout à portée de main et ne s’encombrerait plus des tonnes de dossiers clients qu’il devait emporter avec lui lors des ses tournées.Conte_002

Mais un jour, au détour d’une lecture, le vieil artisan était tombé sur un article traitant de “l’obsolescence programmée”. Quel étonnant concept que de créer des produits avec une durée de vie presque connue à l’avance.

Il suffit par exemple d’insérer sciemment un composant électronique qui s’arrêtera au bout d’un nombre d’heures définies et il vous faut le remplacer, ou pire racheter un matériel.

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Il était hors de question que le vieil artisan se retrouve bloqué en pleine tournée à cause de cette foutue “l’obsolescence programmée”.

Il renonça au GPS, les étoiles continueraient à le guider.

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Il oublia le téléphone portable, il était plutôt d’une nature  taciturne et n’aimait pas bavarder sur son traineau. Et en plus, ses rennes avaient toujours quelque chose à lui raconter pour passer le temps entre deux cheminées.

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Il trouva futile l’idée de la tablette car sa mémoire toujours infaillible garantissait un service quasi impeccable depuis tant d’années.

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En fait, on ne sait pas si ça existe vraiment, l’obsolescence programmée ; parce qu’un constructeur n’a jamais avoué l’avoir mise en place dans ses produits.

Alors que le Père Noël, lui, on est sûr qu’il ne sera jamais obsolète :  de génération en génération, parents et enfants continuent à lui faire confiance pour trouver les souliers au pied de la cheminée…

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Le vieil artisan barbu renonça à changer quoi que soit.

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“Toujours à rêver” lui dit la Mère Noël, ….car comment imaginer que ce Grand Homme pouvait mener à bien sa Grande Œuvre sans qu’une épouse, forcément exceptionnelle, ne soit à ses côtés….

Pas de trainards en traineau…

Encore une fois le Père Noël avait accompli sa mission.

Tout avait été livré en temps et en heure. Pas un cadeau ne manquait. Pas une cheminée n’avait été oubliée. Pas un chausson n’avait été négligé.

Bien sûr, comme chaque année quelques petits ratés, çà et là.

Un camion de pompier avec une grande échelle trop courte.

Un ours en peluche pleurnichard sans son pot de miel.

Ou bien encore une caméra super 8 à la place d’un DVD Blue Ray.

Bon, pour ce dernier incident, c’est parce que la lettre reçue au service « Courrier » disait juste : « Mon Papa voudrait un Super 8 comme cadeau….. » Le Père Noël ne pouvait pas savoir qu’il s’agissait du film super8 de J-J Abrams et non pas d’une antique caméra….

Le vieux barbu tout de rouge vêtu attendait tranquillement que ses invités sonnent à la porte de son chalet. Comme chaque année, après le « Grand Soir » (celui attendu par les enfants, et non pas celui des révolutionnaires comme ils nous l’expliquent ici), ils se retrouvaient tous ensemble à refaire le monde des cadeaux, à commenter leur réussite et leurs déboires (déjà évoqués ici ou bien).

Il y avait la « Petite Souris », ramasseuse de dents de bambins. A force d’en récolter, elle avait pu ouvrir une boutique d’artisanat dentaire où colliers, bracelets et prothèses diverses vendus dans le monde entier lui garantissaient une retraite en fromage jusqu’à la fin de ses jours. « Ça m’évite de faire le guignol avec un chat, dans des dessins animés, comme mon cousin Jerry » rappelait-elle régulièrement…

Il y avait ce bon vieux Saint-Nicolas et son acolyte le Père Fouettard. Précurseur dans le business, Saint-Nicolas avait modérément accepté qu’un jeune employé ambitieux ne le quitte pour créer sa propre affaire : « Père Noël et lutins associés« . L’élève avait dépassé le maitre et Saint-Nicolas avait recruté un autre père Fouettard…

Avec le temps, les rancœurs s’étaient atténuées jusqu’à disparaitre complètement. Et une solide amitié avait même pu se nouer lorsque les « dingos d’Halloween » avaient cru bon de révolutionner les affaires en proposant des cadeaux « qui font peur » la veille de la Toussaint…Unis contre ces nouveaux concurrents, ils avaient bien résisté et pouvaient continuer à proposer des cadeaux « qui font plaisir ».

Le Père Noël appréciait grandement cette soirée, entre vieux complices, où chacun il allait de son anecdote. Il n’était pas rare qu’elle se finisse aux aurores boréales. Bien souvent il leur proposait de dormir à la maison : lorsqu’il y a plus de degrés dans le verre qu’on boit, que dans l’air que l’on respire, il est plus prudent de ne pas repartir en traineau !

« Ding-Dong ! » La sonnette tira le Père Noël de ses pensées…

“Les voilà,” lui dit la Mère Noël, ….car comment imaginer que ce Grand Homme pouvait mener à bien sa Grande Œuvre sans qu’une épouse, forcément exceptionnelle, ne soit à ses côtés….

Le Père Noël doit-il apprendre à nager ?

Noël                 Le Père Noël, bien au chaud dans sa maison, tout là-haut sur le cercle Polaire Arctique, regardait les infos sur sa télé HD dernier cri.

Bien que surchargé de travail en cette période de décembre, il s’octroyait chaque jour quelques minutes de répit. Histoire de se tenir au courant et aussi de reprendre quelques forces devant une soupe bien fumante….

Le sommet de Copenhague sur le réchauffement planétaire faisait la une de tous les J.T. Le Père Noël n’était pas très optimiste sur l’avenir de notre Terre.

Il constatait chaque année que la neige arrivait plus tardivement, que la banquise était moins dense, ce qui rendait ses voisins, les ours polaires, de plus en plus insupportables.

RennesIl avait eu beaucoup de mal à les dissuader de croquer quelques uns de ses rennes…OursBlanc

Les « pôvres » ours blancs trouvaient de plus en plus péniblement de quoi se nourrir.

Et si la banquise fondait, il lui faudrait investir dans un jetski ou un truc similaire car le syndicat des Rennes refuserait probablement d’apprendre à nager pour tracter son traineau métamorphosé en radeau…

« Au pire, se dit-il, j’envoie mes vieux rennes en préretraite et j’embauche quelques jeunes dauphins bien fougueux ou une baleine baleines2qui sera pleine de force pour tracter mon jet-traineau….Mais quitte à me retrouver dans l’eau, autant avoir les pieds dans une mer tropicale…. »

Le Père Noël coupa la télévision, chassât ses pensées pessimistes et se dit que, vu la tonne de courrier qu’il continuait à recevoir, ceux qui croyait toujours au « Père Noël », étaient encore si nombreux qu’il suffisait qu’un ou deux lui envoient une petite lettre pour demander la fin du réchauffement climatique, pour qu’il s’attèle à la tâche et ne trouve une solution.

C’est vrai quoi, en des années de métier, il avait toujours réussi à faire parvenir le cadeau demandé en temps et en heure….

« Ta soupe va refroidir, » lui dit la Mère Noël, ….car comment imaginer que ce Grand Homme pouvait mener à bien sa Grande Œuvre sans qu’une épouse, forcément exceptionnelle, ne soit à ses côtés….

Délocaliser le Père Noël ?

Quelle
belle réussite que l’entreprise « Père Noël & Co ».

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Voilà
plusieurs dizaines d’années que ce modeste artisan du Nord de l’Europe (il
serait installé en Finlande, d’après nos sources…) réussit le tour de force de
livrer en temps et en heure les cadeaux commandés par des millions d’enfants,
grands ou petits. Et tout ça en une seule nuit !

Malheureusement,
on peut craindre une prochaine délocalisation du Père Noël…

Bien
que son usine fut un modèle de productivité, son service client d’une
efficacité redoutable et son réseau logistique absolument exceptionnel, à
chaque hiver, on sentait grandir la menace.

Il
avait déjà dû sous-traiter une partie de la fabrication des jouets :
l’électronique n’était pas son fort et la multiplication des consoles de jeux
ne lui facilitait pas la tâche…
Chandelles

Vu
son grand âge le Père Noël aspirait également à un repos bien mérité, mais
pour le moment, il n’avait pas encore réussi à former un successeur à la mesure de son
talent.

Il
avait bien pensé à Saint Nicolas, vieux concurrent sympathique, mais dont
l’associé, le Père Fouettard, faisait bien trop peur aux enfants : cela
ruinerait l’image de marque.

Il
y avait également la « Petite Souris », spécialiste dans la collecte
des quenottes de bambins, mais sa peur des chats la rendait trop peu fiable :
oserait-elle livrer un foyer avec matou ?

Grves_de_rennes_2Et
puis ses fidèles rennes n’étaient plus très jeunes non plus….et quand il avait
évoqué l’idée d’augmenter le temps de cotisation avant de pouvoir partir à la
retraite, le vent de la grève avait commencé à souffler, plus froid que le
Blizzard du Grand Nord.

Il
avait même imaginé recruter un homme politique, travailleur, habile communicant
et charmeur invétéré. Tout pour plaire. Seul bémol, il promettait beaucoup et
tenait peu : trop de risques de décevoir la clientèle. De toute façon, cet
homme n’était plus disponible pour cause de réélection…

Non
vraiment, la seule solution était de revendre son affaire à quelques
investisseurs chinois.

Ils
étaient capables de tout faire : concevoir à peu près les produits, les
fabriquer à moindre coût en négligeant les normes de sécurité, les livrer dans
des délais raisonnables (1 ou 2 mois de retard). Non vraiment, la seule
solution était de délocaliser.Figurine2

Le
Père Noël en était là de sa réflexion….la pendule sonna, marquant de ses gongs
l’heure du départ. Lui seul avait l’arme absolue qui permettait de livrer les
enfants du monde entier en une nuit : le traineau magique. Et il était hors de
question de révéler ce secret de famille millénaire à n’importe qui.

Il
se vêtit de son manteau rouge, enfila ses grandes bottes, mis sa hotte sur le
dos et se dirigea vers la porte, convaincu qu’il devait pendant encore de
longues années rendre heureux tout ceux qui lui confiait leur chausson à
remplir…

« Ne
prends pas froid » lui dit la Mère Noël….car comment imaginer que ce Grand
Homme pouvait mener à bien sa Grande Œuvre sans qu’une épouse, forcément
exceptionnelle, ne soit à ses côtés….